Sur les traces de Gaston
Mise a jour le 29 avril 2020
Parmi les sites naturels exceptionnels de l’hexagone, le parc national des calanques tient une place à part dans l’univers de la grimpe. Situées entre Marseille et La Ciotat, les falaises des calanques ont été et sont encore un haut lieu de la pratique de l’escalade. Il serait facile de vous inonder de chiffres sur la dimension du parc, le nombre de voies d’escalades, ou lister les performances historiques du « Grec » (George Livanos), mais ce serait manquer le plus important : la poésie du site.
Les calanques de Marseille, c’est un paysage, une ambiance, des émotions qui sont uniques. Imaginez des falaises de calcaire blanc qui brillent sous le soleil du sud, des parois de 100 mètres de haut qui plongent dans une mer turquoise, le panorama est juste époustouflant. Les calanques, c’est aussi la garrigue environnante avec ses odeurs de pin, de thym, de romarin… La marche d’approche sur les sentiers du parc est aussi un moment de détente, de flânerie, de bavardages entre compagnons de cordée, avec le chant des cigales en fond sonore. Pour les plus curieux, il est même possible de faire de petits détours pour découvrir quelques vestiges illustrant la présence des hommes dans les calanques à travers les âges.
Si vous êtes un grimpeur dans le 6a, une voie parfaite pour découvrir ou redécouvrir cette ambiance « grimpe-plaisir » des calanques serait « sur les traces de Gaston ». La voie se situe dans la calanque du Deveson, le secteur de grimpe le plus isolé des calanques, et de fait, celui qui est resté le plus sauvage. Le nom de cette voie est aussi un hommage à l’un des guides les plus célèbres de sa génération : Gaston Rébuffat. Natif de Marseille, Rébuffat a débuté l’escalade dans les calanques. Son talent de grimpeur, son engagement, son énergie l’ont conduit un joué un rôle primordial dans l’ascension du premier sommet de huit mille mètres de l’histoire : l’Annapurna (par Herzog et Lachenal en 1950). Ainsi, l’ascension de cette voie des calanques est aussi l’occasion de se replonger dans quelques récits de cette figure incontournable de l’alpinisme et de revoir quelques photos terrifiantes « d’un grand bonhomme tout fin », grimpant avec une simple corde de chanvre nouée autour de la taille en guise d’assurage…
Aujourd’hui, avec les restrictions de circulation imposées par le parc national des calanques, il faut compter deux bonnes heures de marche pour atteindre le départ de la voie. Toutefois, l’effort est bien récompensé. Outre la belle balade dans la garrigue, l’itinéraire de la voie permet en neuf longueurs d’atteindre le somment de l’aiguille de l’Eissadon dans un cadre magnifique et une ambiance grandiose. Ici, pas de performance technique, la cotation max est donnée en 6a/6a+ max en libre et 5c en tirant au clou. Les cinq premières longueurs consistent en une traversée juste au-dessus de la mer (un à deux mètres en moyenne) pour contourner le socle de l’aiguille. Avant de partir, il est essentiel de s’assurer que la houle n’est pas trop importante, sinon, c’est la douche assurée et les ennuis en perspectives. Dans cette première partie, le rocher peut également être humidifié par les embruns. Il faut donc savoir progresser sereinement dans ces conditions. Puis, la grimpe verticale commence avec une cinquième longueur sur le fil sud de l’aiguille de l’Eissadon. Le paysage change complètement. Le regard se perd sur les falaises des calanques avec la mer à l’horizon. S’il n’y avait pas les bateaux des excursions touristiques qui viennent longer les falaises, nous aurions l’impression d’être perdus loin de la civilisation. L’itinéraire traverse ensuite sur la gauche pour s’enfoncer au-dessus d’un chenal. Le rocher est moins bon sur cette partie (L6 et L7), mais l’ambiance est magique. Cinquante mètres en contre-bas, les vagues viennent heurter le pied de la paroi et résonnent dans ce renfoncement de la falaise comme dans un instrument de musique. Le relais R7 « plein gaz » surplombe la mer. N’oubliez pas les photos souvenirs dans cette section ! Enfin, une dernière partie dans un rocher raide et truffé de fissures permet d’atteindre le sommet. Deux rappels (attention aux cailloux) permettent de retrouver la plage de départ.
Pour les plus motivés, il est également possible d’enchaîner sur l’éperon ouest du cirque de l’Eissadon, avec six longueurs de grimpe en 5c max. Ainsi, il est possible d’enchaîner quinze longueurs au total. C’est une configuration assez rare dans les calanques où en général les grandes voies font en moyenne 4 à 5 longueurs. Contrairement à la voie précédente qui est très bien équipée, il faut prévoir quelques sangles et coinceurs pour cette deuxième partie.
Enfin, si vous avez encore un peu de temps, un petit détour vers l’abri Azéma vous permettra de profiter d’une vue exceptionnelle sur la mer et de découvrir un autre personnage emblématique des calanques : Yves Azémas, officier de la marine marchande, grimpeur et amoureux des calanques, qui officia pour la protection des calanques bien avant la création du parc national.
Frédéric
2 commentaires
kadded farouk
Bonsoir
Un site à découvrir et à parcourir pour bien s’en imprégner. Merci Fred pour ces lignes qui font plaisir à lire. Les calanques sont vraiment un lieu magique pour la pratique de la grimpe, quelque soit le niveau.
Alors trouvez un ou deux compagnons et let’s go !
On y retourne quand ?
Bon confinement à tous.
Martin
Le texte, les photos et le niveau donnent bien envie … Ajouter à la liste d’envie grimpante =D
Merci pour le partage Fred